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Extrait de l’Humanité.fr Vendredi, 9 Novembre, 2018
La commémoration du 11 Novembre peut être l’occasion de réfléchir aux enchaînements qui conduisent au pire et à fuir les instrumentalisations des mémoires.
Une victoire ? Pour qui ? Les commémorations du centenaire de l’armistice qui réuniront dimanche de nombreux chefs d’État éviteront d’exalter un camp des vainqueurs au détriment des vaincus. Emmanuel Macron veut éviter de froisser une Angela Merkel en perdition dans son pays. Mais, surtout, le registre cocardier s’est effacé, et s’accusent les traits saillants de cet immense massacre. Commémorer n’est plus célébrer…
Le 11 novembre 1918, quand à 11 heures entre en vigueur le cessez-le-feu, des milliers de cloches sonnent à la volée, c’est le soulagement qui l’emporte. À Paris, un million de personnes défilent. À Berlin, c’est aussi la joie qui domine. Dans la soirée, Georges Clemenceau, le président du Conseil et un partisan de la guerre à outrance, confie : « Nous avons gagné la guerre et non sans peine. Maintenant, il va falloir gagner la paix et ce sera peut-être encore plus difficile. »
Les carillons résonnent ce jour-là sur une Europe en ruine. Le nord et l’est de la France sont un chaos de tranchées et de trous de bombes. Des paysages ont été remodelés, des villages totalement rasés qui survivent aujourd’hui comme des fantômes aux abords de Verdun, des centaines de milliers d’hectares sont stérilisés… Et 18,6 millions de personnes sont mortes, blessées ou invalides. Une hécatombe à une échelle que personne n’avait osé imaginer. La mort s’est mécanisée, industrialisée, banalisée. Elle ne s’est pas réduite à l’affrontement franco-allemand, à la « revanche ». Ni même au théâtre de la vieille Europe : les deux tiers des militaires tués ne sont pas européens. L’Amérique mais plus encore l’Asie et l’Afrique ont payé le prix du sang avec des troupes coloniales souvent jetées en première ligne.
L’alarme n’a pas été entendue
La haute voix de Jean Jaurès qui annonçait la fournaise est aujourd’hui célébrée. Le dirigeant socialiste et fondateur de l’Humanité avait tenté d’unir les socialistes européens pour contrer la montée des périls, avait alerté les travailleurs français jusqu’à son dernier souffle. En vain. Son assassinat, le 31 juillet 1914, suscita de l’émotion mais pas de réaction populaire. Sa mort levait en quelque sorte le dernier obstacle à la guerre......