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9 juin 2007 6 09 /06 /juin /2007 06:48
Foin de la langue de bois et des arguments de circonstance :   Nicolas Sarkozy fait preuve d’une redoutable habileté. En   quelques semaines, il aura non seulement emporté la  présidentielle, mais plongé la gauche dans un trouble profond. 
Rien n’est pourtant a priori joué, dès lors que près d’un  électeur sur deux s’est opposé, le 6 mai, au nouveau héraut de la droite. Hélas, malgré certains appels formels à la  mobilisation électorale, les dirigeants socialistes semblent anticiper la défaite. Entre atonie, règlements de comptes,  palinodies de l’ex-candidate pour asseoir son leadership sur le parti, et succession de reniements de nature à discréditer la  politique, un climat délétère s’est installé à gauche.

Pareil désarroi, s’ajoutant à la défaite, n’a probablement  pas de précédent depuis 1958. Son ampleur même signe tout à la fois un effondrement politique, une désintégration idéologique,  un affaissement moral. En se revendiquant d’une « modernité »  inspirée de l’exemple de Tony Blair et en abdiquant totalement  devant le modèle libéral, Ségolène Royal et la direction du Parti socialiste auront uniquement permis à Sarkozy de s’approprier les thèmes de la rupture et du volontarisme et  d’en tirer bénéfice auprès d’une fraction des classes populaires. En se précipitant dans le piège tendu par les diatribes sécuritaire et identitaires du candidat de l’UMP, ils  lui auront rendu les armes sur le terrain des idées, lui permettant  ainsi de surfer sur les angoisses d’une société profondément  déboussolée par l’insécurité sociale. Au final, leur social-libéralisme affiché aura facilité le ralliement, à  l’ultracapitalisme du camp adverse, d’ambitieux en quête de  maroquins.  Quel bilan de faillite !
Au passage, on mesure chaque jour davantage à quel point l’incapacité de la gauche de transformation, de la gauche antilibérale, à se rassembler à l’occasion de cette séquence électorale aura contribué au désastre. Faute de pouvoir peser sur le champ politique et dessiner une offre alternative à celle qu’incarnaient le Parti socialiste et sa candidate, elle aura favorisé un vote utile à son détriment, affaibli la dynamique d’ensemble à gauche et, surtout, n’aura pu empêcher le débat  public de dériver à droite.
Nous en sommes là… Il faudra tout faire, les 10 et 17 juin, pour battre les candidats sarkozystes et réunir le maximum de suffrages sur les candidats défendant des propositions clairement de gauche.  Au-delà, c’est toutefois une refondation qui s’impose. Non pour approfondir la logique de l’adaptation à l’ordre dominant,  comme nous y exhortent tant de voix du côté de la rue de Solferino : cela a mené à toutes les catastrophes de ces 25 dernières années et à un troisième échec à la présidentielle ! Ni pour s’ouvrir au centre : en Italie,  l’alliance avec Prodi n’a produit que le terrible désarroi du peuple de gauche, rendant plus arrogante la droite de Berlusconi. Mais pour retrouver enfin le chemin des catégories populaires, rouvrir la voie d’un changement radical, offrir un débouché aux mobilisations sociales.
Nous en sommes convaincus, une gauche d’accompagnement du  libéralisme ne permettra pas de battre la droite et sa politique, de répondre aux attentes populaires. Nicolas Sarkozy n’est  certainement pas l’incarnation d’un nouveau fascisme. Il n’est toutefois pas simplement Chirac en pire. Il se veut porteur d’une authentique contre-révolution conservatrice à la française. Avec lui, le monde des affaires et de la finance entend liquider ce  qu’il demeure des grandes conquêtes sociales arrachées depuis la Libération, briser les résistances de tous ordres qui ont jusqu’alors empêché que le pays se convertisse totalement aux  normes de la mondialisation capitaliste. Ils veulent remodeler de fond en comble notre société. Combattre ce dessein, c’est d’abord et avant tout être au clair avec notre projet et nos valeurs.
Entre priorité aux besoins du plus grand nombre et culte de l’argent-roi ; entre redistribution volontariste des richesses et  précarisation du corps social ; entre extension courageuse des droits et aggravation des discriminations ; entre défense d’un nouveau mode de développement et marchandisation débridée synonyme de dévastations écologiques ; entre développement audacieux de la souveraineté populaire et présidentialisation galopante de notre V° République : les choix à opérer dessinent une gauche enfin à gauche.
Les forces existent pour porter un tel projet. Le pays ne s’est  pas converti en bloc au projet de société du Medef. Les nombreux  mouvements sociaux des dernières années, autant que le rejet  populaire du projet de Constitution libérale pour l’Europe, en attestent. Autour des courants qui ont mené ensemble la campagne du « non » de gauche, dans les collectifs unitaires antilibéraux, mais aussi, plus largement, dans les partis, les forces syndicales et associatives, dans le monde intellectuel et culturel, parmi les citoyennes et les citoyens, dans la jeunesse, nombreux sont celles et ceux qui affichent toujours leur volonté d’entrer en résistance. Ils et elles aspirent à une perspective antilibérale ambitieuse, de justice, d’égalité, de solidarité.
Rassemblons ces énergies, construisons des convergences par-delà des histoires et des traditions différentes, imaginons de nouveaux espaces pluralistes de débat et d’action. Engageons un processus qui pourrait déboucher sur un temps fort du type états généraux.  Et l’espoir renaîtra du champ de ruines que nous lègue la défaite de ce printemps…

Eric COQUEREL (président du MARS – Gauche Républicaine) Claude DEBONS (syndicaliste, co-animateur de la campagne du Non de gauche au traité constitutionnel européen) Christian PICQUET (LCR Unitaire)
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commentaires

C
Les tergiversations et décisions repoussées ont surtout été le fait des cocos qui n'arrêtaient pas de "consulter la base", histoire de mener tout le monde en bateau.Ça a été aussi de la reponsabilité de la LCR de demander des garanties qui lui ont toujours été fournies et sans cesse renouvellées de la manière la plus dure.Notre responsabilité là-dedans est d'avoir pêché par trop de désir de vouloir malgré tout faire l'unité avec : Buffet; Besancenot et... Bové qui y avait aussi sa place.On le sait bien, on y était.Maintenant, beaucoup de ceux qui sont restés l'arme au pier jugent, condamnent, conseillent ou vitupèrent. Que ne l'ont-ils fait lorsque l'on avait besoin de le appui massif pour contrer les appareils.
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D
La gôche. La gôche. La gôche. Mais quelle gauche ? Les tribuns autoproclamés du Collectif national n'arrêtent pas d'implorer la Gôche ! C'est sûr qu'il sont raté une belle occasion. N'oublions pas qu'ils ont leur responsabilité dans l'échec de ce Collectif qui n'arrêtait pas de tergiverser et de repousser les décisions à plus tard. Souvenez-vous, Bové en était parti, et il a été rappelé par une pétition sur internet. Quelle baffe ils ont reçu !<br /> Et maintenant ils se répandent sur la Gôche, sur cette chimère, sans frontière (avec ou sans les sociaux-libéraux ? Avec ou sans les héritiers de Lénine ?). Ils ne font qu'être à la traîne de leurs illusions !<br />  <br />  <br />  
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