Hommage à l'humoriste et comédien, Guy Bedos, qui a tiré sa révérence ce jeudi 28 mai, à l'âge de 85 ans. Un personnage à la fois truculent, sensible, attachant, engagé résolument à gauche.
Un de plus, ou un moins. Voilà, Guy Bedos s’en est allé. Pour retrouver son « cimetière d’amicalités », comme il disait. Simone Signoret, Sophie Daumier, Barbara, Desproges, Mastroianni, Marielle…, et plus récemment Jean-Loup Dabadie, qui avait écrit plusieurs de ses sketchs (parmi les plus connus, tels Bonne fête Paulette, le Boxeur, la Drague). Comédien, humoriste, écrivain. Guy Bedos était un couteau suisse du spectacle vivant.
Né le 15 juin 1934, à Alger, entre une mère pétainiste et un beau-père raciste (c’est assez pour subir des taloches en pleine gueule), Bedos débarque à Paris à quinze ans, intègre quelques années plus tard l’École de la rue Blanche. En 1955, il faisait sa première apparition dans le film Futures vedettes de Marc Allégret. La voix est déjà posée, chaude, fleurant la rocaille. S’y ajoutent des ingrédients de base, les rencontres de Vian, Prévert et Billetdoux.
Dix ans plus tard, en 1965, il débutait sa carrière d’humoriste, avec Sophie Daumier pour partenaire (sur la scène et dans la vie).
C’est dire si Bedos a accompagné nos existences. Il conjuguera toute sa vie les planches et le cinéma. Avec des dates marquantes. En 1962, dans le Caporal épinglé de Jean Renoir, plus tard dans le Pistonné de Claude Berri, en 1970.
Son premier livre, Je craque, est publié en 1976. Guy Bedos y évoque son enfance, le début de sa carrière et ses convictions politiques (il sera vite censuré!).
La même année, il tourne pour Yves Robert Un éléphant ça trompe énormément, puis Nous irons tous au paradis, du même réalisateur.
Bedos est allé de succès en succès, de rencontres en collaborations fidèles. Molière du meilleur one man show, en 1990, dirigé par Patrice Chéreau (Contre l’oubli), il joue encore la Résistible Ascension d’Arturo Ui de Brecht, poursuit ses écritures aux parfums autobiographiques, collabore très tôt à Siné Hebdo, égrène les scènes, s’efforçant, en sale gosse, «de faire du drôle avec du triste.».
Parfois pas mécontent de lui, parfois roublard, nostalgique, follement charmeur, railleur, d’une élégance suprême. Et résolument à gauche (une manière de régler ses comptes avec son enfance, ses parents). C’était aussi ça Bedos. Toujours engagé. Auprès de la Ligue des Droits de l’Homme, aux côtés de Droit au Logement, signataire du manifeste contre le délit de solidarité. Aux aguets. Avec une éclatante marque de fabrique chez lui : la revue de presse. Fameuse. Ça remet loin, en 1975. Une revue ouvertement, clairement politisée, entre deux ou trois sketches, puisant dans l’actualité, d’une citation à l’autre, enfilant ses commentaires comme des fiches cuisine.
Guy Bedos a fait école (Christophe Alévêque en est le plus bel exemple). Si Bedos a fait de cet exercice son objet fétiche, vitriolant et drôle à la fois, lucide et cinglant, c’est qu’il affectionnait tout particulièrement les médias. Inconditionnel et accroc. Fidèle à Politis aussi. Dont il a été rédacteur en chef invité en 2012. Qu’il était venu soutenir dans une soirée en juin 2014 (aux côtés de Christiane Taubira). Entre ces deux dates, en décembre 2013, au moment où il tirait le rideau (celui de la scène), il nous confiait : « Il est prudent d’arrêter avant d’être arrêté. Cela aura été une belle histoire. » Une très belle histoire. Merci Guy.