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27 mars 2018 2 27 /03 /mars /2018 08:34

Le 21 Mars 2018
Madame, Monsieur,

Nous sommes à un tournant décisif concernant l'avenir de la SNCF comme service public intégré. En effet, après deux rapports qui s'inscrivent dans la réduction de l'offre ferroviaire et qui ont suivi un simulacre de concertation avec les assises de la mobilité, aujourd'hui, nous voilà confrontés à une volonté politique de passage en force par le gouvernement, en ayant recours aux ordonnances, pour décider de l'avenir d'une entreprise nationale. Cette entreprise, propriété de la nation, ne peut pas voir son avenir remis en cause par la volonté de quelques-uns. Elle mérite un tout autre débat, qui doit s’appuyer sur les progrès technologiques et une logique de réponse aux besoins de transport Fret et voyageurs.
Preuve s'il en est, de ne pas donner à la communauté des élus et des citoyens le temps nécessaire pour établir un véritable projet qui intègre les enjeux de société en lien avec les besoins de déplacements des populations, l'attractivité des territoires, les conditions d'accès au transport pour tous et la dimension environnementale. Aspects que notre collectif citoyen a placés au cœur de ses actions.
Mais il nous faut bien constater que depuis l'arrivée de Mr Morin à la Région de Normandie, de nombreuses décisions ont été prises sans consultation, telles les suppressions de trains TER, de personnel dans les gares et des guichets. En fait, une anticipation de la politique actuelle qui ne peut avoir que des conséquences fâcheuses pour les usagers et le développement des territoires.

Tout cela n'a été possible qu’avec le consentement de la direction de la SNCF qui préfère soutenir et renflouer le déficit annuel de 150 millions des cars OUIBUS depuis 3 ans plutôt que de développer de nouvelles offres tarifaires et de nouvelles circulations. Ce ne sont pas les seules conséquences des choix opérés par Mr Pépy depuis plus d'une décennie.  Il a procédé à la séparation des activités au sein de la SNCF et le recours massif à la sous-traitance, conduisant ainsi à de nombreux dysfonctionnements comme à la gare de Paris-Montparnasse, entre autres. En rentrant dans  la logique de gestion libérale lors de l'ouverture à la concurrence du FRET par la création de filiales concurrentes de FRET SNCF, il a précipité le déclin  de cette activité. Mesures qui étaient censées relancer cette activité et dont le résultat, tous opérateurs confondus, s’est traduit par une chute de plus de 50 % du volume transporté. Depuis, ce sont près de 4 millions de camions supplémentaires qui ont envahi les routes. Et cela, malgré le Grenelle de l'environnement et les différentes COP qui ont fixé aux états de réaliser une baisse de 40% des gaz à effets de serre d’ici 2030. C’est plutôt mal parti !
Faut-il rappeler que Véolia faute de rentabilité a décidé du jour au lendemain d'abandonner son activité Fret et a laissé ses clients sans solution.

C'est dans la même logique du marché que le gouvernement envisage la transformation de la SNCF en société anonyme. Cela au moment où la SNCF affiche des résultats très positifs, 1,2 milliard et de 2,7 milliards pour SNCF Mobilités.
Il s’agit de définir des secteurs très profitables pour ensuite attirer les actionnaires des multinationales du transport en vue de substantiels profits que financeront les usagers devenus ainsi des clients
Malgré les propos rassurants du 1er ministre sur l'avenir des lignes, la logique comptable risque de l'emporter sur les besoins des populations.

On a déjà donné par le passé. Hier, les services qui étaient gratuits pour d'autres entreprises publiques sont devenus payants. Et dans tous les domaines, cela a entraîné des hausses exponentielles des tarifs et des suppressions massives d'effectifs. L'accès aux différents services est devenu plus difficile par le recours à la dématérialisation des documents. Que deviennent les 30 à 40 % de citoyens touchés par la fracture numérique ? Il en sera de même avec la fermeture des guichets dans nos gares.
L'ouverture à la concurrence n'est pas une obligation en soi, comme le montre une lecture attentive du règlement européen : l’article 5, paragraphe 4, stipule que tout État peut confier et déléguer la gestion des transports ferroviaires à l'entreprise nationale de référence s'il en fait une priorité. Cette exception a d’ailleurs prévalu en ce sens lors de l'interdiction des OGM sur le territoire français.
Comme on peut le constater, en ce qui concerne le réseau ferré, il s'agit bien d'une démarche dogmatique et idéologique de démanteler un service public pour le livrer aux appétits des multinationales du transport.

D'ailleurs dans une note interne, la société TRANSDEV ne cache pas ses vues pour capter des lignes ou des trains sur certaines régions. Elle ne cache pas que des contacts ont été établis avec la Normandie, et l’on comprend mieux la volonté de Mr Morin de vouloir vendre les trains Régiolis qui circulent sur Paris Granville tout en laissant d'autres possibilités pour les autres axes qui traversent notre région. Que deviendront alors l’atelier de Granville, les salariés et les dizaines de millions d’euros investis avec de l’argent public ?

Les suppressions de trains, de guichets et de postes dans les gares ne sont qu'une anticipation d'un projet beaucoup plus funeste pour brader certaines relations à l’exemple de la Relation Caen-Rennes qui va laisser de nombreux usagers à quai.  Sa mise en cause impactera notamment les étudiants qui l’utilisent régulièrement alors même que des partenariats ont été signés entres les universités de Caen et de Rennes.
Qui peut penser que les entreprises privées ne sont pas là pour faire du profit ? Ce qui signifie que les choix seront uniquement dictés en fonction de leurs intérêts économiques et non en fonction des besoins des usagers, et encore moins de l'aménagement du territoire. A moins que l'état et les régions soient prêts à les financer. De fait, c’est donner au privé ce qu'ils refusent à l'entreprise publique, comme cela s'est passé au Royaume Uni, pour un résultat aléatoire et très coûteux pour les deniers publics.

En réalité, aujourd'hui, la dette n'est pas un obstacle insurmontable, il s’agit d’un choix qui peut trouver une solution dans le temps, si la volonté politique est de s'en donner les moyens. Pour autant, de nombreux investissements doivent être réalisés, notamment l’électrification sur les lignes du sud Normandie. Mettre le réseau à niveau, cela commence par la remise en double voie sur Paris-Granville, et la mise à 160km/h des trois axes. Cela permettrait d’envisager des TGV vers Lyon au départ de Caen, une meilleure desserte du Mont St Michel, de gagner 30 minutes sur Paris-Granville et sur les relations connexes. De plus, la continuité de traction électrique permettrait de relancer l’Arc Atlantique en reliant les ports de la façade maritime pour le développement du FRET avec la possibilité du contournement par l’Ouest de Paris. Ainsi, le réseau sud Normandie retrouverait une réelle attractivité pour les voyageurs et les entreprises.

Face aux investissements routiers de ces 20 dernières années qui totalisent plusieurs dizaines de milliards, l’amélioration de ce réseau doit devenir une priorité au moment où les enjeux environnementaux obligent à avoir recours aux modes de déplacements les moins polluants.
 Les financements doivent être recherchés du côté européen. Il est nécessaire d'avoir recours à l'établissement d'un contrat de plan état/régions réellement dynamisant pour les territoires afin de construire des partenariats avec d'autres entreprises ayant une participation publique telle EDF, comme cela s'est fait pour la ligne Paris-Strasbourg.
Comme de nombreuses grandes entreprises, la SNCF a bénéficié de 600 millions d’€ du CICE en trois ans tout en liquidant 6000 emplois. En ajoutant les 450 millions d’€ pour renflouer OUIBUS, c’est plus d’un milliard qui aurait pu être consacré à moderniser le réseau et réellement créer de l’emploi. Question de stratégie et de volonté politique ! Plutôt que de financer par le CICE les entreprises qui licencient, un plan d’investissements dans les infrastructures du même ordre (plus de 50 milliards) créerait de nombreux emplois et faciliterait le développement des territoires.

Dans le domaine des déplacements, il faut renforcer les relations avec le réseau TGV par Le Mans et Rennes pour donner accès aux usagers de notre région aux destinations sur toute la France et en partie au réseau européen sans passer par Paris. Cela nécessite de sortir des logiques d'axes et de reconstruire un véritable maillage de correspondances pour faciliter les déplacements à l'intérieur des régions, vers les régions limitrophes et les destinations nationales et européennes.

La question tarifaire doit être un enjeu clef de la reconquête du service public, car elle doit être placée au centre de toutes les mobilités et s'inspirer de la tarification pratiquée pour les TER en favorisant les modes les moins polluants. N'est-ce pas cette logique qui prévaut pour de nombreuses capitales régionales, de nombreuses agglomérations et départements ? Il faut aussi, trouver d’autres modes de financement et impliquer les bénéficiaires de ces investissements publics. Cela aurait aussi pour conséquence de limiter la consommation des terres et de rationaliser la gestion des espaces publics. 

Tout cela n'est envisageable qu'avec la reconstruction d’une entreprise publique unique de transport qui gère l'organisation des circulations et administre l'ensemble du réseau. C’est la seule possibilité pour en revenir à la logique de la péréquation qui permet aux lignes excédentaires de couvrir les lignes à faible intensité et ainsi maintenir un maillage équilibré des territoires.
Dans ce contexte, il faut également que les métiers de cheminots restent au cœur de la sûreté et la sécurité des circulations et des usagers.
Aussi dans la période qui s'annonce particulièrement importante où des menaces pèsent sur l'avenir du service public, ce qui ne sera pas sans impacter l'avenir de nos villes et de nos basins de vie, nous vous appelons à réagir et à soutenir toutes les actions que nous allons mener pour défendre un outil ferroviaire garant de l'accès à tous et en tout lieu du territoire, qu’il s’agisse du sud Normandie ou du territoire national dans son ensemble

Pour le collectif citoyen des axes sud Normandie
Philippe Denolle

 

Collectif citoyen de défense des axes ferroviaires du sud-Normandie
defenseaxessudnormandie@gmail.com

 

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